Des mots contraires & complémentaires

On me demande régulièrement pourquoi j’ai associé les mots Bienveillant et Implacable dans ma présentation. De prime abord, ils paraissent antinomiques : l’un peut paraître mièvre - « la bienveillance, c’est bien gentil ! » et l’autre – implacable – traduire une certaine forme de rigidité.

Etre bienveillant, c’est « devenir un veilleur sur le cœur de l’autre » comme l’exprime si poétiquement Blanche de Richemont. Et pourtant, vouloir du bien à l’autre quel que soit le cadre de la relation (professionnelle ou extra-professionnelle), n’est-ce pas simplement une attitude de base de nos relations humaines ? Rien, absolument rien de mièvre dans ce terme. C’est au contraire un engagement simplement désintéressé pour l’autre (un ami, un collègue de travail, une personne que l’on rencontre).
Dans un monde où l’individualisme se renforce, où le « Moi je » au détriment des autres fait tant de dégâts, où l’attaque systématique des idées des autres sont monnaie courante, la bienveillance est plus que jamais nécessaire. C’est une force. Ça devrait d’ailleurs être un mot source de notre vocabulaire !

Implacable peut faire peur, parfois. Surtout à notre époque où l’on parle beaucoup de bien-être, de douceur, de tendresse. Et pourtant, l’implacabilité n’a rien à voir avec une quelconque intolérance ou rigidité, elle n’a rien à voir avec l’absence de douceur. Elle est simplement d’un autre ordre, d’une autre nature. Elle pose à chacun la question de ce qui est essentiel : à quoi tu ne renonceras pour rien au monde ? Qu’est-ce que tu défendras, même au péril de ta vie ?

Et dans l’entreprise, la question de ce qui est essentiel est une très bonne question. Quel dirigeant n’a jamais eu à être implacable pour éviter des situations de conflit ? Quel dirigeant n’a jamais eu à être implacable avec lui-même pour être un exemple pour ses équipes ? Qui n’a jamais pris de décision difficile où il a fallu rappeler les règles et trancher… en sachant qu’on ne ferait pas plaisir à tout le monde ? Qui n’a jamais eu à changer de voie professionnelle du fait d’une perte de repère, de valeurs ou de sens dans ce qu’il faisait ? Qui n’a jamais eu à se redresser face à des abus, quitte à perdre gros ?

Alors pourquoi associer bienveillant et implacable ?

La vie est pleine de contraires : elle est à la fois équilibre et déséquilibre, elle est harmonie mais aussi dysharmonie... Et ces contraires sont en même temps complémentaires.
Bienveillant et implacables sont eux aussi des mots contraires complémentaires. Les associer ainsi c’est mettre nos relations humaines dans ce qu’elles ont de plus réel, de plus vivant, de plus concret, de plus juste.